Les offices de tourisme investissent chaque année dans la qualité de l’accueil, la signalétique, la formation du personnel, ou encore l’aménagement des espaces pour mieux accueillir les personnes en situation de handicap.
Mais avant même de franchir la porte d’un office, le parcours d’un voyageur – avec ou sans handicap – débute bien souvent en ligne. Et c’est là que tout se joue.
Pourtant, un grand nombre de sites d’offices de tourisme affichent encore la mention « non conforme au RGAA » (Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité).
Résultat : des territoires qui s’engagent sur le terrain, mais une expérience numérique souvent inadaptée et décevante.
Un comble, alors même que l’accessibilité figure parmi les valeurs clés du label Destination d’Excellence.
Le paradoxe : des destinations inclusives, mais des sites exclusifs
Sur le terrain, les progrès sont indéniables. Les offices engagés dans une démarche qualité ou labellisés Tourisme & Handicap ont élevé leurs standards d’inclusion sur ces dernières décennies. Et c’est une bonne nouvelle.
Mais quand on passe du comptoir d’accueil au clavier d’ordinateur, cette dynamique se brise.
Les exemples ne manquent pas : Montpellier, Avignon, Marseille ou Lyon sont toutes des destinations engagées dans des démarches d’inclusion, pourtant leurs sites web affichent encore des déclarations de non-conformité au RGAA.
Ces territoires ne sont pas des exceptions, ils reflètent une réalité partagée par de nombreux acteurs touristiques : un retard numérique sur la qualité d’accueil et l’accessibilité.
A ce jour, la majorité des sites web d’offices de tourisme en France n’ont jamais été audité ou restent sous le seuil des 50% de conformité partielle au RGAA*.
Une situation qui révèle un vrai paradoxe : l’accessibilité numérique reste trop souvent considérée comme un « plus », alors qu’elle conditionne l’accès même à l’information touristique.
En effet, la récente étude « Parcours d’achat des clientèles en situation de handicap » réalisée en Auvergne-Rhône-Alpes rappelle que :
- Plus de 9 personnes handicapées sur 10 organisent et réservent elles-mêmes leurs séjours
- 41% d’entre elles utilisent des sites ou applis pour préparer leurs séjours
- Près d’une sur deux réserve leur séjour ou activité en ligne

Ces voyageurs sont autonomes, connectés et exigeants – comme tous les autres.
Mais lorsqu’une information n’est pas accessible, c’est un séjour entier qui devient impossible à organiser.
L’accessibilité numérique n’est donc pas un « supplément d’excellence » : c’est la première condition d’accès à la destination.
*Rappel : un site est dit « conforme » lorsqu’il respecte 100% des critères du RGAA, « partiellement conforme » à partir de 50% et « non-conforme » en dessous.
Ces erreurs qui coûtent cher
L’accessibilité numérique ne se décrète pas une fois pour toutes, elle se cultive au quotidien.
Un site peut avoir été conçu « accessible » initialement et devenir partiellement inutilisable au fil du temps : contenu mal structuré, image sans description, plugin incompatible… Et ce sont des centaines d’internautes qui, peu à peu, se retrouvent exclus !
Faisons le point sur les erreurs les plus fréquentes, leurs conséquences et les bons réflexes à adopter pour les éviter.
1. Documents non accessibles
Ce que ça signifie
Vos brochures et programmes sont illisibles ou inutilisables via un lecteur d’écran.
La plupart du temps, les internautes font face au message (audio) suivant : « Ce document semble vide. Il s’agit peut-être d’un document mal structuré ou d’une image numérisée nécessitant la reconnaissance optique des caractères. »
Ou, lorsque la lecture est possible, le document est lu d’une traite, sans structure logique (titre, liste à puces, etc.) et les informations sont souvent énoncées dans le désordre.
Cette situation engendre de la frustration, une perte d’information et d’autonomie pour les personnes aveugles ou malvoyantes notamment.
Quelques pistes d’améliorations
- Créer ses documents dans un format structuré, comme pour ses pages webs
- Exporter le PDF avec balises d’accessibilité et vérifier l’ordre de lecture de vos contenus. Astuce : Dans Canva, déplacer les éléments en arrière-plan ou premier plan pour changer leur ordre de lecture
- Si possible, vérifier l’accessibilité du PDF avec PAC ou Adobe Acrobat Pro et tester la lisibilité avec un lecteur d’écran comme NVDA ou VoiceOver
Ressources utiles
2. Formulaires non explicites ou accessibles
Ce que ça signifie
Comme pour les documents, certains champs des formulaires ne seront pas lisibles par les lecteurs d’écran : les internautes ne savent donc pas ce qu’ils doivent saisir.
Cela peut les empêcher de demander des informations, s’inscrire ou faire une réservation.
Quelques pistes d’améliorations
- Simplifier vos formulaires : ne demandez que des informations essentielles et réellement utiles
- Associer chaque champ du formulaire à une étiquette claire ou un texte d’aide
- S’assurer que tous les champs sont accessibles au clavier (Tab / Entrée)
- Prévoir des messages d’erreurs explicites et compréhensibles
Exemple
Le formulaire de contact de Clermont Auvergne Volcans est lisible et facilement utilisable au clavier :
- Encadré bleu pour situer la sélection actuelle
- Touche tab pour passer d’un champ à l’autre
- Barre espace pour sélectionner les listes ou case à cocher
- Touche entrée pour valider
3. Contenus multimédias sans alternative
Ce que ça signifie
Les lecteurs d’écran ne peuvent pas décrire les nombreuses images ou vidéos présentes sur votre site : les non-voyants, malvoyants, sourds ou mal entendants ne peuvent pas bien les comprendre.
Quelques pistes d’améliorations
- Ajouter systématiquement une balise alt courte et pertinente à chaque visuel
- Fournir des sous-titres ou une transcription pour chaque vidéo, même pour les vidéos uniquement promotionnelles (description des paysages et lieux)
- Eviter les carrousels qui bougent automatiquement sans contrôle de l’utilisateur
Exemples

Exemples de balise trop vague, qui ne décrivent pas réellement le contenu de la photo – à éviter :
- alt=″photo″
- alt=″kayak_ubaye_tourisme_2022″
Exemple de balise alt correcte :
- alt=″deux personnes en kayak sont en train de descendre une rivière dans la vallée de l’Ubaye, entourées de forêts et de rochers″

Exemples de balise trop vague, qui ne décrivent pas réellement le contenu de la photo – à éviter :
- alt=″montagne″
- alt=″photo_paysage_ubaye_2025″
Exemple de balise alt correcte :
- alt=″vue du vallon du Lauzanier, dans le parc du Mercantour, un vaste paysage de montagnes traversé par un petit ruisseau sinueux″
A savoir : si l’image est purement décorative, vous pouvez aussi utiliser alt=″ ″ (avec un espace vide) pour signaler au lecteur d’écran qu’il peut l’ignorer.
4. Contraste insuffisants et/ou texte trop petit
Ce que ça signifie
La lecture est difficile notamment pour les seniors, malvoyants ou personnes atteintes de troubles dys. La navigation est plus fatigante et peut décourager certains internautes à consulter votre site.
Quelques pistes d’améliorations
- Vérifier les contrastes avec des outils comme Couleur Hexa, Adobe Color Analyzer ou WebAIM (vous devez avoir un contraste superieur ou égal à 4.5)
- Privilégier les polices sans empattement
- Utiliser une taille de police suffisamment grande (au moins équivalent à une taille 14) et laisser la possibilité aux utilisateurs d’agrandir le texte
Exemple
Le site internet du Pays Basque utilise des contrastes nets et des textes lisibles.
5. Navigation impossible au clavier ou à la voix
Ce que ça signifie
Les personnes ne pouvant pas utiliser la souris (handicap moteur ou visuel) ne peuvent pas accéder à tout ou partie de vos contenus.
Quelques pistes d’améliorations
- Tester la navigation avec la touche Tab : chaque élément interactif doit être atteignable
- Tester la navigation avec un lecteur d’écran comme NVDA ou VoiceOver
- Eviter les menus uniquement déclenchés au survol de la souris
- Penser à indiquer l’attribut de la langue (lang= »fr » ou lang= »ang ») pour que le lecteur d’écran prononce le texte dans la bonne langue
6. Liens et zones cliquables trop petite ou ambigües
Ce que ça signifie
Pour les personnes à motricité réduite (tremblements, troubles moteurs), cliquer devient difficile. Si la zone est trop petite et demande de la précision, ils ne pourront pas facilement réaliser les actions.
En parallèle, les liens « cliquez ici » ne donnent aucun repère de compréhension supplémentaire.
Quelques pistes d’améliorations
- Agrandir les zones interactives (44 x 44 px minimum recommandé)
- Espacer suffisamment les différents boutons ou liens
- Rédiger des liens explicites : voir la carte des hébergements, réserver une visite guidée, consulter le programme, …
Exemple

7. Textes complexes
Ce que ça signifie
Plus vous utilisez votre propre jargon, des mots complexes, des abréviations ou des figures de style, plus la compréhension de votre texte est difficile.
Quelques pistes d’améliorations
- Appliquer les principes du FALC (Facile à lire et à comprendre)
- Eviter le jargon institutionnel et les abréviations non expliquées
Exemples
| A éviter | A privilégier | 
|---|---|
| Afin de garantir une expérience optimale à l’ensemble de nos visiteurs, nous mettons à votre disposition un dispositif innovant de médiation numérique favorisant l’inclusion et l’accessibilité. | Nous proposons des tablettes tactiles avec des vidéos sous-titrées et traduites en langue des signes. Ces tablettes aident tous nos visiteurs à mieux comprendre la visite du musés. | 
| Au détour d’un chemin, laissez-vous envoûter par l’immensité ondoyante des lavandes en fleurs. Sous le soleil d’été, leurs parfums capiteux dansent dans l’air chaud et enveloppent le promeneur d’une douce ivresse provençale. | En été, les champs se couvrent de lavande. L’air sent bon et le vent fait bouger doucement les fleurs violettes. Vous pouvez les admirer et les photographier depuis la route panoramique ou le long des sentiers de randonnée. | 
A retenir : Un texte accessible n’est pas forcément « plat ». Il est concret, sensoriel et utile. On peut faire rêver sans perdre personne en route.
C’est peut-être un détail pour vous, mais pour eux, ça veut dire beaucoup
Ces « détails » ont des conséquences bien réelles : perte de visiteurs, mauvaise image, incohérence avec les valeurs d’accueil, expérience dégradée…
Les risques d’une accessibilité incomplète
L’obtention du label Destination d’Excellence valorise l’accueil, la durabilité, la qualité de service.
Mais ignorer le RGAA et l’accessibilité numérique, c’est créer une faille dans la cohérence globale de la destination : comment parler d’excellence si certains visiteurs sont laissés à la porte… de votre site web ?
Derrière un site inaccessible, se cachent des risques réels :
Un risque juridique
La conformité au RGAA est une obligation légale pour tous les organismes publics, dont les offices de tourisme.
Elle découle de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, rendue obligatoire à partir de 2016 par la loi pour une République numérique, puis renforcée par le décret du 24 juillet 2019.
Chaque site doit faire l’objet d’un audit, publier une déclaration d’accessibilité et présenter un schéma pluriannuel d’accessibilité numérique. Ces documents constituent le socle d’une démarche d’amélioration continue et engagent juridiquement la structure.
Depuis juin 2025, la directive européenne sur l’accessibilité numérique élargit les obligations à de nombreux acteurs privés et confirme une tendance de fond : l’accessibilité n’est plus une option, mais devient un standard incontournable du numérique.
Un risque réputationnel
Un territoire engagé dans une démarche qualité ou d’accueil inclusif, mais dont le site est non-conforme, créé une incohérence perceptible aux yeux du public et affaiblit sa crédibilité. Tout le monde devrait pouvoir utiliser internet et y trouver facilement les informations nécessaires pour préparer leurs vacances.
Un risque économique
L’expérience numérique fait partie intégrante du parcours d’un voyageur. Si elle est mauvaise, ce sont autant des visiteurs potentiels qui renoncent à découvrir votre territoire, parfois dès la 1ère page de votre site.
Se mettre en conformité
La bonne nouvelle, c’est qu’il n’est jamais trop tard pour s’améliorer et se mettre en conformité.
1. Auto-évaluer son site
Avant de vous lancer dans un audit complet, vous pouvez commencer par un diagnostic.
Plusieurs outils gratuits permettent d’évaluer l’état d’accessibilité de votre site, comme :
- Le diagnostic flash officiel du gouvernement
- L’extension « Assistant RGAA » pour Chrome
- La plateforme gouvernementale ARA
Important : Ces outils ne sont pas magiques, ni automatiques. Ils nécessitent un minimum de connaissances techniques.
Ces outils vous permettent de faire un premier état des lieux et donnent une bonne idée de la prise en compte ou non du RGAA dans vos processus, mais ils ne remplacent pas un audit RGAA officiel, qui doit être conduit selon une méthodologie précise.
2. Publier une déclaration d’accessibilité, même partielle
La déclaration d’accessibilité est obligatoire pour tout les sites. Elle doit refléter la réalité de votre conformité RGAA à un instant donné, que cette conformité soit complète, partielle ou non-conforme.
3. Prioriser les actions correctives
Identifier les actions les plus rapides et prioritaires à réaliser.
Par exemple, si certains critères du diagnostic flash ne sont pas respectés, vous pouvez commencer par là : navigation au clavier, contrastes, balises alt, liens explicites, hiérarchie cohérente, etc.
Puis, adoptez les bons réflexes d’accessibilité pour tous les nouveaux contenus publiés, et à chaque refonte.
4. Faire auditer votre site
Un audit RGAA officiel doit être mené par un prestataire qualifié.
Il suite une méthodologie précise, analyse un échantillon représentatif de vos pages et identifie précisément les points conformes et non conformes. Cet audit vous permet d’obtenir un taux de conformité officiel et d’entrer dans une véritable démarche de progrès.
Quelques prestataires spécialisés
- Access42 : coopérative reconnue d’utilité sociale, spécialisée en accessibilité numérique depuis plus de 10 ans
- Numerik-ea : agence dont la mission est de rendre le numérique accessible à tous
- Boscop : engagé pour un web inclusif depuis plus de 15 ans
- Temesis : experts en accessibilité, écoconception et conformité RGPD des services numériques
- Axénum : cabinet de conseil aux organisations spécialisé sur les enjeux d’accessibilité numérique et d’inclusion numérique
- ThinkMyWeb : agence de conseil en stratégie digitale responsable, spécialisée dans le tourisme
5. Mettre à jour sa déclaration d’accessibilité
Après l’audit, actualisez votre déclaration d’accessibilité : taux de conformité, non-conformités, actions en cours ou prévues.
6. Former les équipes
Une accessibilité durable repose sur la montée en compétences de tous les acteurs impliqués : rédacteurs, chargés de communication, webmasters, etc. Car un site accessible, c’est une culture d’équipe.
7. Suivre et maintenir
L’accessibilité numérique n’est pas un projet ponctuel, c’est un processus continu. Prévoyez un suivi régulier pour garantir la conformité de votre site dans le temps.
Quelques exemples de bons élèves
Bien qu’il reste difficile de trouver des sites d’offices de tourisme 100% conformes sans dérogation, nous avons sélectionné quelques sites qui présentent de meilleurs résultats que la moyenne :

Le site d’En Pays Basque est 100% conforme, mais présente néanmoins certaines dérogations : consulter leur déclaration d’accessibilité

Equinoxe Manche, démarche collective pour préserver ce qui fait l’essence de la Manche, présente également un site 100% conforme, avec quelques dérogations : consulter leur déclaration d’accessibilité

Anjou Tourisme est partiellement conforme à 62.5% sur son site grand public et à 98% sur son site dédié aux pros : consulter leur déclaration d’accessibilité
Une hospitalité de A à Z
L’accessibilité n’est pas qu’une contrainte réglementaire, c’est une preuve d’attention, un gage d’hospitalité.
La véritable qualité d’une destination ne se mesure pas seulement à son accueil sur place, mais aussi à la clarté de son site web, la lisibilité de ses supports ou la compréhension de ses messages.
C’est là que se rejoignent les démarches Destination d’Excellence, Tourisme & Handicap et RGAA, pour construire une expérience fluide, inclusive et cohérente, du 1er clic au retour à la maison, en passant bien sûr par l’expérience vécue au sein de la destination.
Mais au-delà du RGAA, c’est une vision globale de la qualité web qu’il faut embrasser, à la croisé de la sobriété numérique, de l’écoconception, de la performance et de la durabilité. Ces dimensions se renforcent mutuellement : un site plus accessible est souvent plus léger, mieux structuré, mieux référencé et plus agréable à utiliser… pour tous les internautes (même pour les IA) !
Parce qu’au fond, l’excellence ne commençait-elle pas simplement par cela : offrir la même qualité d’expérience à tous, sans distinction ?
Ressources utiles
- Référentiel RGAA : https://accessibilite.numerique.gouv.fr/
- Etude Auvergne Rhône Alpes : « Parcours d’achat des clientèles en situation de handicap »
- Diagnostic flash officiel du gouvernement : https://design.numerique.gouv.fr/outils/diagnostic-flash/
- Plateforme Ara : https://ara.numerique.gouv.fr/
- Assistant Chrome RGAA : https://chromewebstore.google.com/detail/assistant-rgaa/cgpmofepeeiaaljkcclfldhaalfpcand?hl=fr
- Outils pour vérifier vos contrastes : Couleur Hexa, Adobe Color Analyzer ou WebAIM
- Lecteur d’écran : NVDA , Microsoft Speech Platform, VoiceOver sur Mac (à activer avec le raccourci : command+F5)
Formations sur cette thématique à venir

Savoir accueillir les personnes en situation de handicap
Cette formation a pour objectif de permettre aux personnes accueillant ou accompagnant des personnes en situation de handicap, d’améliorer leurs postures, leurs connaissances et leurs savoir faire.
Cette formation est obligatoire pour l’obtention de la marque Tourisme & Handicap.
Prochaines sessions
- Du 6 au 7 novembre 2025 – à Aix
- Du 13 au 14 novembre 2025 – à Sisteron
- Du 9 au 10 mars 2026 – à Aix

Concevoir des documents en Facile à Lire et à Comprendre (FALC)
Découvrez comment transformer vos documents d’informations touristiques en outils de communication clairs et accessibles grâce à cette formation spécialement conçue pour les offices de tourisme.
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